Quand vous avez créé votre boutique créative, vous avez sûrement plus pensé à vos créations qu’à votre modèle financier ! Mais, à un moment, il est temps de faire le point et de vérifier que votre projet vous rapporte de l’argent, ou au moins, ne vous en fait pas perdre. C’est là que le travail sur votre modèle financier va vous aider.
Je vois le modèle financier comme un ensemble d’éléments qui s’articulent entre eux pour créer (ou non) de la valeur. Il évolue bien sûr dans le temps, en fonction de vos envies et des opportunités que vous rencontrez. Concrètement, c’est un fichier Excel, qui vous permet de faire varier tous les éléments que vous pouvez changer (coût des matières premières, canaux de distribution, prix de vente, etc…) et qui calcule automatiquement l’impact de vos décisions sur votre rentabilité et vos revenus.
Bien le connaître vous permet de prendre du recul et de faire des choix stratégiques éclairés. Votre modèle financier, c’est votre rêve traduit en fichier Excel !
Voici une approche simple, en quatre étapes, pour vous aider à réfléchir au modèle financier de votre boutique créative.
Imaginez votre chiffre d’affaire comme un fleuve où l’eau s’écoule, tranquillement et régulièrement. C’est l’argent qui entre dans vos caisses quand vous vendez vos créations. Mais tout ce flux ne finit pas directement en rémunération pour vous, il doit servir aussi à irriguer différents éléments de votre projet : la production, la vente et le développement. Votre fleuve se rétrécit petit à petit, à chaque embranchement, et ce qu’il vous reste en rémunération sera peut-être une rivière ou un ruisseau.
L’enjeu du travail sur votre modèle financier, c’est de déterminer la taille et la composition de votre fleuve et la taille et la destination de chacun des trois embranchements dont nous allons parler dans cet article.
Je vais vous expliquer cela avec deux exemples :
Marine a 32 ans et elle créé des bijoux. Ce qu’elle adore, c’est apprendre de nouvelles techniques pour que ses bijoux soient toujours plus perfectionnés. Elle aime découvrir de nouvelles matières et apprendre à les travailler. Elle est plus à l’aise seule dans son atelier ou devant son ordinateur que dans un marché bondé.
Sophia, elle, a 43 ans et elle fabrique des savons. Elle maîtrise très bien sa technique et ce qu’elle aime, c’est fabriquer des fournées de savons parfumés, comme sa grand-mère lui a enseigné, et aller à la rencontre des clients dans les marchés du coin.
1/ La production
Le premier embranchement qui ponctionne votre fleuve, c’est la production en elle-même. Pour créer, vous utilisez des outils (qui restent après la production), des matières premières (qui sont consommées pendant la production) et des services (électricité, eau ou le loyer d’un atelier par exemple).
Je vous propose de vous poser les questions suivantes :
- Utilisez-vous des matières premières relativement chères ou peu chères ?
- Avez-vous besoin d’outils, de matériel ou de services simples ou complexes ?
- Pouvez-vous produire en grande quantité ou en petite quantité ?
La clé pour déterminer ce niveau de votre modèle financier, c’est d’être au clair sur vos coûts de production et votre capacité de production.
Marine, par exemple, utilise des matières premières très chères et du matériel toujours à la pointe de la technologie. Elle produit des petites séries, car elle passe beaucoup de temps à fabriquer ses bijoux, en utilisant des techniques complexes.
Sophia, elle, utilise des matières premières locales et abordables, et le même matériel depuis des années. Elle produit de grandes quantités de savons.
Ce qui continue de couler dans votre fleuve une fois vos matières premières, votre matériel et vos services payés, c’est la marge de production.
2/ La vente
Le second embranchement sert à financer la vente de vos créations. Pour vendre vos produits, vous devez faire de la publicité (en ligne ou hors ligne), payer des commissions (à des plateformes par exemple), payer des emplacements dans des marchés, vous déplacer, acheter des matériaux d’emballage si vous vendez à distance.
Je vous propose de vous poser les questions suivantes :
- Est-ce facile d’envoyer vos créations ?
- Souhaitez-vous vendre en ligne, dans des événements, à des boutiques ?
- Quelle stratégie de communication est la plus adaptée à votre projet ?
Marine vend ses bijoux sur son site Internet et à des boutiques de luxe. Elle paie de la publicité en ligne et est très présente sur les réseaux sociaux. Elle paie occasionnellement les services d’un photographe pour mettre en valeur ses créations.
Sophia vend sur les marchés et les événements locaux, elle paie des adhésions à des associations et groupements d’artisans et les emplacements sur les marchés. Elle a également des frais d’essence. Elle se fait connaître grâce à des partenariats avec d’autres créateurs et elle fait imprimer des flyers et des cartes de visite.
Ce qu’il vous reste une fois l’argent consacré à vos frais de ventes retiré de votre marge de production, c’est une marge brute.
3/ Le développement
Le dernier embranchement sur lequel vous avez une influence, c’est le développement de votre projet. Vous avez sûrement des idées pour le futur de votre boutique créative. C’est peut-être une formation pour affiner vos compétences ou alors l’achat de nouvelles machines pour diversifier votre gamme de produits, ou tout simplement renouveler votre matériel. Il s’agit de préparer le futur proche et lointain de votre projet en intégrant dans votre modèle un montant à mettre de côté régulièrement.
Je vous propose de vous poser les questions suivantes :
- Comment voyez-vous votre boutique dans 2 ans ?
- Avez-vous besoin de nouveaux outils pour atteindre votre objectif ?
- Avez-vous besoin de nouvelles compétences pour atteindre votre objectif ?
Marine rêve de suivre une formation très spécifique qui lui permettrait de se spécialiser dans une technique peu connue en France. Cette technique nécessiterait l’achat d’un outil aux Etats-Unis.
Sophia voudrait renouveler son équipement et en profiter pour augmenter sa capacité de production, ce qui lui permettrait de produire plus, ou alors de passer moins de temps pour produire la même quantité de savons.
Une fois ces frais de développement pris en compte, ce qu’il vous reste c’est votre résultat avant impôts. Vous avez ensuite vos charges et impôts à payer, sur lesquels vous n’avez que très peu d’influence. On arrive enfin à ce qu’il vous reste à la fin : votre rémunération.
C’est le moment maintenant de revenir au début de l’histoire et de vous pencher sur la taille du fleuve du début.
4/ Le chiffre d’affaire
Le fleuve initial est composé des quantités vendues et de vos prix de vente. En prenant en compte votre capacité de production, il reste à fixer vos prix de vente.
Je vous propose de vous poser les questions suivantes :
- De quel prix (bas, moyen, haut) avez-vous besoin pour que le modèle défini jusqu’à présent soit rentable ?
- Est-ce qu’il y a des clients qui paieraient ce prix pour votre produit ?
- Quels éléments ajuster pour que votre modèle financier vous ressemble, soit adapté au marché et rentable ?
Vous l’aurez sûrement deviné, les prix de vente de Marine sont parmi les plus hauts du marché, alors que ceux de Sophia sont dans la moyenne basse.
Tous ces éléments sont inter-connectés et l’idée est d’ajuster chacun d’entre eux pour trouver un modèle qui vous ressemble et qui vous rapporte de l’argent !
Si vous voulez approfondir le sujet, vous pouvez découvrir les outils et formations en lignes que je propose aux créatrices ou faire appel à mes services pour un accompagnement individuel.
Très belle explication, il manque juste un dernier embranchement et non des moindre, qui est celui des taxes dûes à l’Etat (entre 12 et 20% du CA tout de même) et qui doit donc également être pris en compte dans le calcul des prix.
Merci Allison ! En effet, je n’ai fait que mentionner cet élément, qui n’est pas négligeable, je suis d’accord. J’ai fait ce choix car la marge de manœuvre est réduite à ce niveau, elle réside dans le choix du statut et c’est un sujet à part entière !
Fixer le prix de vente de ses produits est compliqué. Après avoir mis sur Excel le détail des coûts et charges, je me suis rendue compte que j’avais une marge trop faible et j’ai dû augmenter mes prix. Et c’est toujours sur notre rémunération qu’on rogne. Il est important de se pencher sur la rentabilité de ce que l’on fait et cet article répond bien au problème et inclut la continuité et le développement de l’activité. Merci beaucoup.
Super article très intéressant ! Bravo les MC 🙂
Merci Martine ! En effet, fixer son prix est un exercice essentiel mais difficile. Il faut prendre le temps de faire les calculs, sans oublier d’y inclure sa rémunération, le développement et les imprévus. Cet exercice nécessite souvent aussi d’affronter la peur du jugement sur la valeur que l’on donne à son propre travail. Des compétences qui se développent avec l’expérience !